La proposition de loi portant protection des femmes et autres personnes victimes de violences domestiques et de discriminations liées au genre, initiative de l’honorable sénateur Modeste Bahati Lukwebo, a été déclarée recevable, hier jeudi 2 octobre, par l’assemblée plénière du Sénat.

Elle sera transmise à la commission mixte Socioculturelle Genre Famille et enfants-Politique, administrative, Juridique et Droits Humains (PAJ). Le bureau a accordé 5 jours à cette commission pour un examen approfondi », a déclaré l’honorable   Président du Sénat, Jean-Michel Sama Lukonde.

Présentant le contexte ayant inspiré sa proposition de loi, le sénateur Modeste Bahati dit être parti du constat selon lequel, la RD Congo fait face à une montée alarmante des violences domestiques et des discriminations liées au genre. Il explique que ces violences concernent particulièrement les femmes, les jeunes filles, les enfants et le personnel domestique, mais touchent également certains hommes.

« Elles entraînent des conséquences dramatiques : mort, traumatismes psychologiques, déscolarisation, féminicides, divorces, enfants de la rue, précarité sociale, etc. », a-t-il indiqué, confiant qu’à ce jour, les quelques dispositions du Code pénal congolais et d’autres textes juridiques en la matière demeurent trop générales, éparses et peu adaptées aux réalités vécues par les victimes.

«Ce vide persiste nonobstant la Convention numéro 190 de l’OIT sur la violence et le harcèlement du 25 juin 2021, l’Ordonnance-Loi numéro 15/013 du 1er août 2015 portant modalités d’application des droits de la femme et de la parité, l’ordonnance-loi n° 23/023 du 11 septembre 2023 modifiant et complétant le code pénal congolais en ce qui concerne l’intimidation et la stigmatisation basées sur le genre, les coutumes rétrogrades, le lévirat et le sororat forcés les violences basées sur le genre à travers les réseaux de communication, le voyeurisme et le chantage. De même, l’arrêté ministériel du 10 juillet 1998 portant création d’un Conseil national de la femme qui devra maintenant s’appuyer sur un Observatoire National de la Violence Domestique ».

SANCTIONNER TOUTES FORMES DE VIOLENCES DOMESTIQUES

Selon son auteur, la proposition de loi sous examen au Sénat vise, notamment, à : la prévention, la dénonciation et la sanction de toutes les formes de violences domestiques et discriminations liées au genre. S’ajoutent à cela, la   protection  des victimes par des mesures rapides et efficaces (ordonnances de protection en 48 heures, refuges, assistance gratuite) ; le renforcement de la répression contre les auteurs de violences et de harcèlement sexuel dans les milieux domestiques, scolaires, professionnels et politiques ; la création d’un  Observatoire National de la Violence Domestique (ONVD) chargé du suivi, de la collecte de données fiables et des propositions de réformes et enfin assurer l’égalité des chances et protéger les citoyens contre toute forme de discrimination politique ou sociale fondée sur le genre.

DES INNOVATIONS

L’honorable Modeste BAHATI LUKWEBO a, par ailleurs, fait savoir que cette proposition de loi apporte de principales innovations ci-après : une procédure judiciaire rapide, gratuite et accessible à tous ; une définition large des violences domestiques (physiques, psychologiques, sexuelles, économiques, symboliques) ; des sanctions renforcées contre les auteurs, y compris dans le cadre familial, professionnel et éducatif ; protection des victimes grâce à des refuges, une assistance judiciaire gratuite, et des programmes de réinsertion ; interdiction des médiations dans les cas graves, pour éviter la pression sur les victimes ; la rééducation obligatoire des auteurs de violences, pour briser le cycle de récidive ; l’intégration de la lutte contre les discriminations politiques et sociales ; la mise en place d’un financement dédié et d’une évaluation régulière de l’impact de la loi.

Réagissant aux interventions des élus des élus des provinces lors du débat général, le sénateur Bahati a répliqué en ces termes : « Cette proposition de loi qui reste ouvert à toute éventuelle modification n’est pas seulement un texte juridique, mais un engagement politique et moral pour une RDC plus juste, plus humaine et plus respectueuse de la dignité de chacun. Son adoption fera honneur à notre pays et répondra à une attente profonde de notre peuple ».

CE QU’A PENSE LA RAPPORTEURE DU SENAT

Prenant la parole lors du débat général qui suivi la présentation de l’économie générale du texte, l’honorable Rapporteure du Sénat, Néfertiti NGUDIANZA KISULA, a proposé plutôt une loi modifiant les lois déjà existantes et qui irait dans le sens d’aggraver les peines en cette matière.

« Je proposerai que le deuxième vice-président, auteur de ce texte, puisse réfléchir à proposer une loi modifiant les lois déjà existantes et qui iraient dans le sens d’aggraver les peines au lieu de vouloir créer la roue parce que, toutes les infractions, tous les faits dont on parle ici sont déjà érigés en infraction par le Code pénal. Nous devons éviter ici de pouvoir parler des infractions qui existent déjà et qui ont déjà été traitées sur des lois à foison », s’est exprimée la sénatrice Néfertiti NGUDIANZA.

Il importe de rappeler qu’au cours de la même plénière du jeudi 2 octobre, la 3eme de la session ordinaire en cours, le Sénat a également approuvé le Projet de loi portant prorogation de l’état de siège, proclamé en début du mois de mai 2021, dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu, en proie à une insécurité chronique, du fait de l’activisme de nombreux groupes armés.

« Cette nouvelle prorogation permettra aux forces de Défense et de Sécurité de poursuivre, sans désemparer, leurs opérations militaires, afin de neutraliser définitivement les forces négatives » a motivé M. Marc EKILA, Ministre d’État à la Formation professionnelle qui a présenté l’économie dudit projet de loi.

Tout en accédant à la demande du Gouvernement, les sénateurs ont, cependant, réitéré leur recommandation portant évaluation de l’état de siège en vue de sa requalification. Rituel oblige, la plénière du Sénat du jeudi 2 octobre a commencé par l’adoption du procès-verbal n°2 de la séance plénière du 24 septembre dernier.

DICOM